Face au chaos institutionnel : écologie ou autoritarisme

L’instabilité gouvernementale chronique témoigne d’un système à bout de souffle. Face à l’impuissance démocratique, une tentation grandit : celle de l'autoritarisme. Pour Laure Haag, l'enjeu n'est pas de choisir entre démocratie et efficacité, mais au contraire de réinventer la démocratie à la hauteur des défis écologiques.

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L’effondrement de la crédibilité démocratique

L’instabilité politique chronique, ponctuée de gouvernements qui se succèdent tous les trois mois, offre le spectacle désolant d’un système à bout de souffle. Cette séquence projette une image catastrophique du monde politique : impuissant et inutile face aux défis du moment, il semble avoir renoncé à chercher des solutions constructives.

Quand les élus n’arrivent plus à gouverner et que l’administration paraît paralysée, l’ensemble de la classe politique et des fonctionnaires se trouve décrédibilisé. Cette frustration pousse certains à envisager la suppression pure et simple de postes jugés inutiles, plutôt que de repenser fondamentalement nos institutions pour qu’elles redeviennent un véritable relais entre les citoyennes et les citoyens et l’action publique.

L’illusion de l’efficacité autoritaire

Face à cette impuissance démocratique, une tentation grandit : celle de l’autoritarisme. Les régimes autocratiques paraissent plus efficaces dans la compétition économique mondiale, plus rapides dans leurs décisions, moins entravés par les débats et les contre-pouvoirs. Cette apparente supériorité séduit une population déboussolée qui ne voit plus d’alternative crédible dans le paysage politique actuel.

Nos dirigeants, en restant bloqués dans des schémas économiques et politiques dépassés, légitiment cette dérive en adoptant la logique de la compétitivité à tout prix. Dans cette course effrénée au PIB, la démocratie devient un obstacle, les fonctionnaires une charge, et les débats citoyens une perte de temps qui nuit à la productivité. Nous pensions que les régimes autocratiques finiraient par ressembler aux démocraties européennes, mais c’est nous qui risquons de leur ressembler pour rester “compétitifs”.

Mais compétitifs pourquoi ? Jusqu’à quand ? Sur quelle planète ? Avec quelle humanité ? Ces questions essentielles ne trouvent pas de place dans un modèle qui tourne sur lui-même à l’infini, aveugle à ses propres limites.

La réalité de la finitude

Car la réalité nous rattrape inexorablement. La nature n’est pas une ressource exploitable à l’infini. Les énergies et matériaux se raréfient. 

Cette cécité face aux limites planétaires nous place devant un choix de société crucial. D’un côté, nous pouvons persister dans la prédation des ressources, en optimisant leur utilisation pour ceux qui en profitent déjà. Cette voie exige l’efficacité maximale, quitte à sacrifier la démocratie, jugée trop lente, et à réduire les espaces de dialogue social, perçus comme des freins à la productivité.

L’alternative écologique et démocratique

L’autre choix, celui que nous appelons de nos vœux, consiste à faire un “pas de côté”. C’est le choix du partage et du lien, celui de la lucidité face à notre situation. Il s’agit de ne plus infantiliser la population, qui est prête à entendre la vérité, mais qui se trouve de plus en plus séduite par l’autocratie faute d’alternative crédible.

La voie de l’écologie nous engage à poser les questions fondamentales : de quoi avons-nous réellement besoin ? Comment définir ensemble ce qui nous est essentiel ? Comment le produire de manière soutenable ? Comment le partager équitablement sur notre territoire local, national, européen, mondial ?

Repenser la démocratie pour l’urgence écologique

Voici les questions cruciales que la France devrait traiter de manière véritablement démocratique, au lieu de s’enliser dans le cycle stérile des remaniements gouvernementaux où “tout change pour que rien ne change”.

L’enjeu n’est pas de choisir entre démocratie et efficacité, mais de réinventer nos institutions pour qu’elles soient à la hauteur des défis écologiques. Cela implique de dépasser le court-termisme électoral, de créer des espaces de délibération citoyenne sur les enjeux de long terme, et de réconcilier l’action démocratique avec l’urgence écologique.

Face au chaos institutionnel actuel, nous avons le choix : glisser vers l’autoritarisme au nom de la compétitivité, ou inventer une démocratie écologique capable de nous guider vers un avenir soutenable. Ce choix déterminera non seulement notre modèle politique, mais l’habitabilité même de notre planète.

Laure Haag, animatrice du réseau des élues et élus de Génération Écologie 

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